Tombe des Morts !
Encore cette odeur de sang sous mon ciel
Innocent.
Tombe des Morts !
Toujours ces fronts ivres de sueurs
Dans des champs sans promesses
Et ces lèvres d’enfants collées
Au mamelon des poubelles
Et ces yeux toujours veufs
D’un sourire d’avenir
Et ces dents grinçant de froid
Au plus fort du Sahel et toujours
Et toujours ces squelettes ambulants
Près des chiens potelés ...
Tombe des Morts !
Tant de ténèbres pour tant de cœurs
Alors qu’il brille assez de soleil
Pour tous les cœurs
Et tant d’insomnies pour tant de ventres
Alors qu’en paix
Peuvent dormir tous les ventres
En paix
En paix.
Hier
Pas plus tard qu’hier
Un seul bataillon de cœurs battant en chœur
Et rugissant à perdre haleine
Un seul credo de solidarité
Contre mille ogres banquetant sur
Mille négrocides.
Hier
Pas plus tard qu’hier
Rappelle-toi mon ami mon frère
Cette indigeste nuit de colcotar que nous
Broyions-broyions-broyions
Dans la fraternité carrare de nos chairs de poule
De nos golgothas et de nos fours
Crématoires.
Puis cette soif de vache.
À grands coups de langue lamentables
Elle lampait une larme de thallium vendue
À l’encan.
Éteinte
Cette fleur ardente
Plantée là
Dans nos cœurs par le souffle immortel des Martyrs.
Hier
Pas plus tard qu’hier.
Que de merveilles accouchées dans la chair crue
De nos rêves.
René Philombe, « Tombe des Morts ! », Espaces essentiels, Paris, Éditions du Silex, 1983.
Si vous êtes détenteur des droits afférents à ce poème ou connaissez la personne qui l’est, merci de nous contacter : info@lesvoixdelapoesie.ca.